Ecologie : du vide philosophique au vide politique
J'écoutais hier encore Dominique Bourg, le bon client écologiste typique, sur France Inter mercredi dernier (29/1/2014). Universitaire médaillé comme un sauveteur, il cumule toutes les qualités de l'interviouvé bobolandais. Son élocution est claire, son contenu consensuel en diable, le ton reste toujours égal en toutes circonstances. Il vient de publier une anthologie, une sorte de petit livre vert, comme celle d'Ariane Debourdeau.
Il en fallait, effectivement, du flegme pour présenter l'écologie en tant que mouvement politique sans tomber dans les innombrables chausses-trappes que les fondements idéologiques de cette nouvelle religion ont placés sous les pieds de l'acolyte béat.
Bourg commence par distinguer écologie et écologisme militant, qui aurait le tort de simplifier. Il ne dit pas si Arne Naess, ce penseur anti-humain, est écologiste ou écologiste militant. Ecologique, certainement : depuis qu'il est mort, son bilan carbone est proche de zéro, et même peut-être un peu négatif. Ceux qui s'en réclament en tous cas ne manquent pas de polluer l'atmosphère par leur seule agressivité.
Le philosophe a raison de faire remarquer que les difficultés d'interprétation des textes écologiques proviennent de malentendus d'ordre religieux. Si Descartes brosse du monde une vision "théocentrée", les écologistes lui reprochent amèrement sa vision "anthropocentrée" et substituent à cette insupportable hérésie une vision "géo-centrée", du nom de Gaïa, la nouvelle déesse des adorateurs de la Nature et de ses Saints (Yann Arthus-Bertrand, Nicolas Hulot, René Dumont, etc.).
Il s'agit, pour le philosophe médiatique, de camoufler autant que possible la nature anti-humaine de l'écologie, et en particulier le malthusianisme, qui n'a pas bonne presse. Qu'il s'agisse des mensonges sur le réchauffement planétaire ou de la fiction du développement durable, il faut impérativement donner de l'extermination rêvée d'une partie de l'espèce humaine une image acceptable. C'est ce que Dominique Bourg appelle "Tous les textes que l'on a placé dans cette anthologie sont très clairs, tous caractérisent une prise de conscience assez précise de l'impact des activités humaines sur le milieu." Ah, qu'en termes choisis ces choses-là sont dites !
Au sujet de Malthus et de son modèle mensonger sur l'accroissement de la population humaine, Bourg ne peut que constater que cette tradition de "pensée" est omniprésente jusqu'à aujourd'hui et qu'il s'agit d'une question centrale. "C'est là dès le départ. Mais je dirais que, si vous voulez, il y a une espèce de sursaut d'inquiétude juste dans l'après-guerre. (...) Alors ce qui est intéressant si vous voulez dans cette espèce de veine malthusienne, ça montre, si vous voulez, le côté bigarré en terme de politique classique de la pensée écologique. Ces gens-là sont plutôt à... à... à droite, hein ? Une droite méchante, hein ? C'est à dire une droite qui déteste les pauvres parce qu'ils se reproduisent comme des lapins." On sent la gène, non ?
Et Jean Lebrun de rappeler avec malice qu'un député écolo d'aujourd'hui prône avec délicatesse la "grève du 3e ventre".
Je n'ai pas élagué, déformé les propos, je ne les ai pas déplacés de leur contexte et ils peuvent être réécoutés pour vérification. Dominique Bourg vient donc effectivement d'expliquer que la doctrine malthusienne est centrale dans la pseudo-pensée écologiste et qu'elle appartient à une forme dure d'idéologie de droite, une droite méchante, une droite anti-pauvre. C'est exactement ce que je dis depuis plus de quatre ans sur ce blog !
Et Bourg de faire aussitôt la preuve de ce qu'il avance par l'exemple en faisant la pub d'un bouquin appelé Ten billions, livre dont il adopte une lecture malthusienne. Son auteur, Stephen Emmott, travaille chez Microsoft, une société dont les qualités philanthropiques et altruistes sont bien connues. Et pourtant, de façon surprenante, le livre d'Emmott a pour but de montrer que la Terre est capable de surmonter la prétendue crise démographique que l'humanité l'oblige à traverser : "entire global ecosystems are not only capable of suffering a catastrophic tipping point, but are already approaching such a transition".
En bref : le philosophe inspirateur des écologistes montre que son mouvement favori est bien d'extrême droite et qu'un livre anti-malthusien arrive à des conclusions malthusiennes.
Je crois que je commence à apprécier Dominique Bourg à sa juste valeur !